Mèdecin et patient

Un grand aéro-park pouvant accueillir un grand nombre de planers et d'engin de secours, sous un dôme où l'on peut respirer, ...

Un grand bâtiment, blanc, orné de quelques couleurs, par-ci par là. Derrière, on distingue les arbres d'un parc naturel (mon œil) reconstitué "pour le confort des patients" dit le panneau...

Une grande porte à doubles battants ornée d'une croix rouge, symbole indémodable qui a traversé les âges, continue à faire pleurer les enfants et rêver les étudiants.

Les temps ont changé pourtant. On est bien loin de l'effervescence des hôpitaux du passé dont on voyait les portes s'ouvrir toutes les trente secondes, laissant passer un brancard, une famille endeuillée, un patient plein de pansements, une bande de médecins prenant leur pause ...
Aujourd'hui l'hôpital est un lieu calme, serein, aseptisé, où on nous dit que tout va bien et en effet, bizarrement, tout vas mieux quand on en ressort.

Mark déteste l'hôpital.

Et pourtant, c'est second séjour en moins d'un mois. Il sert les dents et franchit les portes, pâle et au bord de la nausée. Il lui est difficile de faire avancer son fauteuil avec une seule main, l'autre étant serrée contre son ventre, rougissant sa chemise.
Une fois entré, il jette un regard vers le guichet d'accueil. Ouf, c'est une toute jeune infirmière. Il s'avance et en profite pour vérifier les noms des médecins officiants dans les salles de consultation. Aucun "Lyoness" à l'horizon. Tant mieux.
Sans même desserrer les lèvres, il fait signe à la jeune infirmière en tapant du plat de sa main valide sur le guichet. La jeune femme baisse les yeux sur lui et sa bouche s'ouvre en un O surpris qui ne fait même pas réagir le mécanicien.

Il a trop mal à la tête car, il le sait, il a perdu beaucoup de sang. D'ailleurs, il le sens battre à ses tempes et ses oreilles bourdonnent. Dans un effort quasiment sur-humain, il lève sa main blessée et la montre. La jeune femme pianote sur son ordinateur et, quelques secondes plus tard -qui semblèrent une éternité au jeune homme- il l'entend annoncer, à travers le bourdonnement de son oreille :

-Le docteur Liam RedStorm va vous recevoir dans quelques instants dans la salle de consultation n°2, sur votre gauche. Veuillez patienter quelques instants, il ne devrait plus tarder.

Patienter ?! Elle en a de bonnes !
Mark manœuvre difficilement son fauteuil jusqu'à la salle d'attente tout en maudissant l'infirmière. Il se positionne face à la salle de consultation n°2 et, alors que sa vue commence à se troubler, commence une attente qui lui parait interminable.

Liam sortit de la salle d'opération, complètement exténué. L'intervention avait duré plusieurs heures, et il n'aspirait qu'à son lit. Il se rendit dans la salle de repos afin de se changer, et de pouvoir regagner son appartement. C'est alors qu'une infirmière munie déboula dans la salle:

-Docteur RedStorm, on a une urgence devant la salle n°2, vous êtes le seul disponible! Mark Lyoness, blessé à la main, il ne peut pas attendre!

Liam ne put s'empêcher de grimacer un peu. En théorie il avait fini son service voilà plusieurs heures, il n'avait pas dormi depuis une éternité. Mais il fit un signe de tête à l'infirmière, qui sortit tout aussi vite. Il reboutonna sa blouse, mais se servit au moins un café avant de sortir. S'il ne buvait pas de caféine, il risquait tout bonnement de bâcler l'intervention! Mais la médecine est un sacerdoce, cela n'a rien d'un métier comme les autres. Il avala tout le café d'un coup, se brûlant les lèvres au passage, et sortit en direction de la salle de consultation.

Après quelques couloirs et d'innombrables salles d'opération, chambres, etc. Liam arriva, limite en courant vers son patient. C'était un homme en fauteuil roulant, qui pressait sa main ensanglantée contre sa chemise. Il se plaça devant le patient, et lui dit assez vite:

-Bonjour, je suis le Docteur RedStorm, je vais m'occuper de vous. On va entrer pour que je puisse voir votre blessure, d'accord?

Il se déplaça un peu pour ouvrir la porte avant se prendre le fauteuil pour le faire entrer. En d'autres circonstances il aurait laissé le patient se déplacer seul, mais sa main rendait toute tentative très douloureuse. Dans ce cas, c'était donc lui qui s'en chargerait, fierté froissée ou non. Ils entrèrent dont dans la salle, identique à tant d'autres dans cet endroit. Il plaça le fauteuil roulant contre le fauteuil d'observation. Mais tout d'abord, il devait observer plus avant la blessure.
Il refit très vite la queue de cheval qui retenait ses cheveux blonds, se lava précautionneusement les mains et se rapprocha du patient.

-Montrez-moi votre main, je vous prie.

Saisissant délicatement la main blessée au niveau du poignet pour ne pas lui faire mal, Liam observe la blessure de plus près. Elle n'est pas très jolie à voir, elle semblait provenir d'une blessure légèrement plus ancienne, qui se serait rouverte. Il récupéra vite fait de quoi nettoyer la plaie, pour commencer. Tout en passant une compresse imbibée d'alcool sur la plaie, il s'adresser à son patient:

-Monsieur Lyoness, pourriez-vous me dire comme vous êtes vous fait cela? La blessure semble ancienne, mais elle s'est rouverte, non?

Un bruit de pas dans le couloir menant aux salles de consultation le sort de sa torpeur. Auraient-ils enfin retrouvé ce fameux docteur ? Mark commençait à se demander si cela ne les amusait pas de le faire poireauter de la sorte.

-Bonjour, je suis le Docteur RedStorm, je vais m'occuper de vous. On va entrer pour que je puisse voir votre blessure, d'accord?

Mark leva le regard vers la personne qui se tenait devant lui. Il dut cligner deux fois des yeux pour rendre sa vue plus claire et aussi parce qu'il avait bien du mal à croire que le jeune homme qu'on lui avait envoyé était médecin. Il fit la moue. Si c'était ce gamin qui devait se charger de lui, peut-être avait-il tout intérêt à se barrer et à régler le problème seul, comme la dernière fois.
Il allait poser sa main valide sur la roue de son fauteuil pour faire marche arrière mais le jeune médecin ne lui en laissa pas le temps. Il se déplaça un peu pour ouvrir la porte avant de prendre le fauteuil pour le faire entrer.

En temps normal Mark aurait grogné, il aurait même insulté celui qui osait faire cela sans son accord, qui osait lui manquer ainsi de respect et surtout, qui osait cracher sur sa fierté. Mais là, la douleur, son état de faiblesse à cause de la perte de sang et la surprise avec laquelle le jeune homme l'avait pris, le laissèrent muet.

Le docteur RedStorm, puisque tel était son nom, plaça le fauteuil de Mark devant celui de consultation et alla se laver les mains, laissant le temps au mécanicien d'étudier les lieux.
Une salle blanche, une lumière crue, des tas d'instruments médicaux dont il ignorait le nom mais dont il devinait aisément la fonction, des étagères en verre dont chaque étage renfermait des produits étiquetés et cette odeur de désinfectant, si forte qu'elle vous faisait tourner la tête. ... A moins que ce ne soit à cause du sang qu'il avait perdu. Il ne savait plus. La seule chose dont il était sûr à présent c'est que cette salle lui en rappelait une autre, dans une autre aile du bâtiment, celle des patients longue-durée. Et il se dit qu'il devait sortir d'ici au plus vite.

Le jeune docteur revint vers lui et saisit sa main pour l'observer avant d'y passer une compresse imbibée d'alcool. Mark avait beau ne pas être douillet, il serra les dents.

-Monsieur Lyoness, pourriez-vous me dire comme vous êtes vous fait cela? La blessure semble ancienne, mais elle s'est rouverte, non?

Si sa mâchoire n'était pas aussi serrée, il aurait bien laissé échapper un rire nerveux mais rien ne passa.
Il déglutit e se força à ouvrir la bouche pour répondre d'une voix rauque au médecin :

- Me suis entaillé avec une de mes scies à métaux. Y'a un peu plus d'un mois. ... Suis venu ici mais ...

Il hésita un instant puis décida que ce jeune docteur n'avait pas à connaitre toute l'histoire. Et puis de toutes façon, ce n'était pas ce qu'il lui demandait.

- ... Une urgence. J'ai du repartir. j'ai cautérisé au fer blanc, chez moi. ... mais bon, j'suis pas docteur et bon ... j'crois que ça s'est infecté et rouvert alors ... Si vous pouviez me remettre d'aplomb, que j'me casse le plus vite d'ici, je vous en serais infiniment reconnaissant.

Son regard se posa sur la porte de la salle de consultation. Il n'avait qu'une trouille : qu'Il ne se pointe dans cette pièce, même s'Il n'avait aucune raison de le faire.

Le patient lui expliqua ce qui s'était passé pour sa blessure se retrouve dans un si vilain état. Et la raison agaça légèrement légèrement Liam intérieurement, sans qu'il en montre rien. Si des personnes faisaient de si longues études, sacrifiaient tant de choses à la médecin, ce n'était pas pour que n'importe s'imagine que ce genre de soucis devaient être pris à la légère! Cependant, alors qu'il commença à préparer ses instruments pour la suture, Mark lui demanda de faire au plus vite. Sans cesser de se préparer, le jeune médecin lui expliqua:

-Je suis désolé, mais cela ne va pas être possible. Vous avez besoin de plusieurs points de suture, et de quelques radios avant cela. Je peux vous promettre de faire cela le plus vite possible, mais il est hors de question pour moi de bâcler votre opération. Si cela s'infecte encore une fois,c'est l'amputation que vous risquez!! Et si c'est possible, j'aimerais ne pas vous revoir dans ce genre de circonstances.

Quittant un instant la pièce, Liam alla chercher une infirmière, et il tomba sur celle qui l'avait appelée dans la salle de repos.Il lui expliqua que son patient avait besoin de radios pour vérifier qu'après la suture, la main se comporterait bien. L'infirmière alla donc à la suite du jeune médecin chercher le patient dans la salle de consultation, et l'emmena vers le service de radiologie, tandis que Liam achevait de se préparer. Il profita de ce moment de calme pour réfléchir à quelque chose qui le turlupinait depuis un moment.

Beaucoup de personnes n'aimaient pas les hôpitaux. Liam avait passé tellement de temps entre ces murs stérilisés qu'il s'y était fait, mais il pouvait également comprendre que l'atmosphère aseptisée pouvait mettre mal à l'aise. Selon lui, un hôpital n'était pas la mort, mais la vie. C'était dans ces lieux qu'on se battait chaque jour, à chaque minute et seconde qui passait, pour la vie. Quoi qu'il en soit, il pouvait comprendre cela, ce qui pourrait expliquer la demande de son patient de faire vite. Mais ses coups d'oeil furtifs et nombreux en direction de la porte n'avaient pas échappés au jeune drogué, qui n'était pas sûr de comprendre leur signification. On aurait presque pu croire...qu'il avait peur de voir quelqu'un...
C'est alors que le Terrien fit le lien entre le nom de famille de son patient et cette impression de déja-vu. Le docteur Lyoness! Très connu du monde médical, un véritable génie de la génétique! Liam se souvenait avoir fait l'un de ses stages en tant qu'étudiant dans son service, et il avait retiré de cette expérience de nombreux enseignements sur la médecine. Mark faisait-il partie de sa famile, et si c'était le cas, serait-ce la raison de son apréhension?
A priori, il n'y avait que peu de chance qu'ils ne se croisent. Depuis quelques temps, le docteur Lyoness restait en quasi-permanence dans son laboratoire, et ne restait que peu au contact des patients. Cependant il lui arrivait encore, de temps à autre, de faire la tournée des patients, en tant que grande figure de l'hôpital et médecin talentueux. Si ses suppositions étaient les bonnes, Mark avait peut-être raison de se méfier...ou pas.

Au bout d'un moment, l'infirmière revint, accompagnée de son patient. Et Liam remarqua alors que le jeune homme n'allait pas parvenir à se hisser seul sur le "billard", à cause de sa main, et qu'il n'était pas question de l'opérer dans son fauteuil. Une fois l'infirmière partie s'occuper d'une autre urgence, Liam approcha le fauteuil de la table.

-Je suis désolé, je vais devoir vous soulever une seconde.

Et sans plus de cérémonie, Liam se pencha pour le soulever par les épaules. A 26 ans, le blond avait beau paraître très longiligne de corps, voire frêle, il était doté d'une force physique tout à fait respectable, et supporter le poids de son patient l'espace de deux secondes ne lui posa pas plus de problèmes que cela. Il prit délicatement ses jambes pour les mettre dans une bonne position, et le laissa s'allonger. Le jeune médecin se plaça du côté de sa blessée et vérifa une dernière fois qu'aucune mèche n'avait l'intention de s'échapper de sa queue de cheval avant de lui expliquer brièvement:

-Je vais vous demander d'étendre votre bras en croix, afin de me permettre de suturer. Je vais vous faire plusieurs piqures autour de votre blessure pour vous anésthésier, avant de recoudre la blessure. Vous ne sentirez plus votre mains durant quelques heures. Une fois chez vous, il faudra très régulièrement désnfecter la suture, et d'ici quelques semaines vous reviendrez ici pour que je vous enlève les points. Si tout se passe bien, vous n'aurez plus de problèmes.

-Je suis désolé, je vais devoir vous soulever une seconde.

Cela le fit réagir. Malgré son mal de tête, malgré ses pensées tourmentées, malgré le lieu, il sortit de son état de torpeur pour lever un regard étonné sur le jeune docteur. Ce type maigrichon était-il vraiment capable de le soulever tout seul ? Et quand bien même, il ne pouvait pas laisser faire ça. Et sa fierté alors ?
Il n'eut cependant pas le temps de répliquer. Déjà le docteur RedStrom le prenait par les épaules et le soulevait pour le placer sur la table d'opération. Le mécanicien resta coi pendant qu'il plaçait ses jambes dans la bonne position. Non seulement il en était capable, mais en plus il l'avait fait, comme ça, ... tout simplement. Mark était en quelques sortes "choqué". Il mit quelques secondes à se rendre compte que le médecin lui parlait.

-Je vais vous demander d'étendre votre bras en croix, afin de me permettre de suturer.

Il étendit le bras en serrant les dents. Le moindre mouvement lui faisait ressentir la douleur de la blessure et étendre les doigts lui demanda vraiment un grand effort.

Je vais vous faire plusieurs piqures autour de votre blessure pour vous anésthésier, avant de recoudre la blessure. Vous ne sentirez plus votre mains durant quelques heures.
-Vraiment ?! S'exclama-t-il d'une voix rauque.

Il hésitait entre la gêne que cela lui faisait de ne pouvoir bouger sa main pendant plusieurs heures et le soulagement de ne plus sentir la douleur. Finalement, il décida qu'il avait assez souffert et que si cela pouvait s'arrêter, ce serait tant mieux. Il soupira donc de soulagement et se détendit un peu.

-Une fois chez vous, il faudra très régulièrement désnfecter la suture, et d'ici quelques semaines vous reviendrez ici pour que je vous enlève les points.
-Y'a pas d'autre choix ? Je suis vraiment obligé de revenir ? Grogna-t-il ... Bon ... si vous y tenez ! Ajouta-t-il d'un air bougon.

Ce jeune médecin avait l'air sérieux et même si le mécanicien ne faisait pas confiance aux docteurs -question de principe- celui-ci faisait peut-être exception à la règle.

-Si tout se passe bien, vous n'aurez plus de problèmes. Finit Liam.
-J'espère bien. Ça m'embêterais de devoir revenir plus d'une fois.

La main tendue, aussi détendu qu'il pouvait l'être dans un hôpital, il laissa le docteur s'occuper de lui, attendant avec un peu d'impatience le moment où la douleur s'envolerait grâce à l'anesthésie.

-Je peux vous poser une question indiscrète Doc ? Demanda-t-il soudain, sans trop savoir pourquoi. Quel âge avez-vous ?

Mark parut surpris que quelqu'un de la carrure de Liam soit capable de le soulever. Mais le jeune médecin ne s'attarda pas là-dessus, et termina de s'occuper de l’anesthésie tandis que son patient lui faisait clairement comprendre que moins il mettait les pieds dans cet hôpital, mieux il se portait. Le Terrien ne répondit rien, ce genre de comportement était relativement courant, même si rarement dans une telle mesure. Mais bon, il pouvait sans doute comprendre.

-Si vous préférez, je pourrai peut-être me rendre à votre domicile pour enlever les points, ce n'est pas une manipulation à risque. Mais, d'une part je ne vous le promets pas, avec mon emploi du temps, et de plus je préfèrerai tout de même le faire ici. Si vous le souhaiter, on peut essayer de s'arranger.

C'était tout de même la première fois de sa courte carrière qu'il proposait un arrangement de la sorte! Liam était presque étonné de s'entendre prononcer cela, mais si le malaise de son patient avait un rapport avec ce génie de la médecine qui portait le même nom de famille que lui, autant éviter une éventuelle confrontation, si du moins c'était cela qu'il fuyait.
Cependant, la question suivant surprit tellement Liam qu'il en resta un instant figé, la seringue en l'air. Il prit néanmoins le temps de procéder à toutes les piqures de l’anesthésie avant de répondre:

-J'ai 26 ans. Mais ne vous faites pas de souci, malgré mon âge votre suture se déroulera dans les meilleures conditions possibles. Et vous pouvez m’appeler Liam, si vous voulez, pas besoin de me donner du "Doc"!

Liam avait dit cela d'un ton assez détendu, tandis qu'il préparait la suite de l'opération. Au fond, la suture en elle-même n'était pas très compliquée à réaliser, cela ne poserait aucun problème majeur.
Après plusieurs pressions autour de la blessure pour s'assurer que Mark ne sentait absolument plus rien, Liam commença délicatement la suture, les yeux rivés sur son travail.

Le jeune homme œuvrait assez vite pour quelqu'un de son expérience, ses gestes étaient précis et directs. Et pourtant, malgré son silence, il ne paraissait nullement stressé et presque tranquille. En réalité, dans la plupart des cas où il affichait cette expression, c'était tout simplement qu'il savait très bien cacher son stress, et qu'il savait que voir un médecin tranquille rassurait les patients. Dans ce cas précis, Liam n'était pas réellement détendu, il ne l'était jamais vraiment dans ce genre de situation, mais il savait qu'il n'y avait à priori aucune raison pour que cela se passe mal. S'il avait fait tous ces efforts sur les bancs de la faculté de médecine, c'était justement pour faire naturellement ce genre de choses!

Cependant, alors qu'il venait de finir le premier point et qu'il commençait le second, le blond se rendit compte que ses mains tremblaient légèrement, et il poussa un discret soupir. Il ne s'agissait que de l'immense fatigue accumulée ces dernières heures qui se conjuguait avec le manque d'As. Après tout il n'avait pu prendre aucune dose depuis le début de sa garde, et cela commençait à se faire cruellement sentir dans sa tête. Cependant, tentant de cacher que ses gestes étaient un peu moins précis qu'au début, le jeune homme continua comme si de rien n'était, essayant de garder son esprit rivé sur ce qu'il faisait au lieu de sur la seringue -qui e contenait pas de l’anesthésiant, celle-ci qui attendait sagement chez lui.

Lorsque le médecin lui proposa de passer chez lui pour enlever les points, Mark fut surpris. Son dégout et sa haine pour son père était telle qu'elle s'était étendue au corps entier des médecins, sans qu'il eut jamais pensé que tous n'étaient pas comme l'homme qu'il détestait. Ce jeune docteur semblait arrangeant et il apprécia le geste.

-Mais, d'une part je ne vous le promets pas, avec
mon emploi du temps, et de plus je préfèrerai tout de même le faire ici.
Si vous le souhaiter, on peut essayer de s'arranger.

Puis, répondant à sa seconde question, il ajouta :

-J'ai 26 ans. Mais ne vous faites pas de souci, malgré mon âge votre suture se déroulera dans les meilleures conditions possibles. Et vous pouvez m’appeler Liam, si vous voulez, pas besoin de me donner du "Doc"!

Il réfléchit un instant et se dit finalement que l'hygiène de son atelier et de sa chambre n'était pas vraiment favorable à un geste médical, aussi bénin soit-il.

-Ça ira. Je viendrai. Dit-il d'un ton bourru. Promettez-moi seulement que C'est à vous que j'aurai à faire, Liam, et à personne d'autre.

Puis il se décrispa et se laissa aller à sourire. Liam n'avait qu'un an de moins que lui et pourtant il avait l'impression de faire tellement plus vieux. Sûr qu'ils n'avaient vécu de la même façon. Néanmoins, le jeune docteur lui plaisait. Il n'était pas effrayé ni dégouté par son infirmité, il les respectait et était franc et direct.
Il releva la tête sur son siège médical et observa les mains de Liam qui s'agitaient avec précision à recoudre sa blessure. Il était efficace et l'anesthésie avait été faite correctement. Mark ne ressentait rien. Il poussa un soupire de soulagement. Finalement il avait bien fait de venir à l'hôpital ; sa main se remettrait bien mieux que si il avait de nouveau tenté de se soigner lui même.

Au bout du premier point, la main de Liam se mit à trembler. Rien qui ne puisse inquiéter un patient et le mécano ne fit aucune remarque. Seulement le médecin poussa un léger soupire et tenta de camoufler son trouble. Mark leva les yeux vers le visage du jeune homme, marqué par la fatigue.

-Tout va bien Liam ? Vous devriez peut-être penser à vous reposer un peu non ?

Il sourit. Il lui semblait ironique que ce soit le travailleur blessé qui donne des conseils de santé au docteur diplômé.

Liam fut tout de même content de Mark accepta de revenir à l'hôpital pour ôter les points, ainsi cela éviterait des complications inutiles. Bien sûr, avec les moyens modernes, on pourrait presque transformer une maison en salle d'opération, mais pour le jeune médecin prendre le risque était inutile. Et bien sûr, il répondit par l'affirmative à la demande de son patient:

-Je vous promets que c'est à moi que vous aurez à faire, monsieur Lyoness. Je vous prendrai un rendez-vous, et quand vous reviendrez, précisez bien que c'est le docteur RedStorm qui se charge de votre dossier.

Et, sur ses bonnes paroles, le jeune médecin commença donc son travail.
Malgré cette légère faiblesse, Liam comptait ben terminer cette intervention dans les règles, et avec le sourire s'il-vous-plaît! Il choisit de ralentir un peu ses gestes pour ne pas être gêné par les tremblements, et s'attaqua au deuxième point comme si de rien n'était.
Cependant, son patient se rendit compte de ça, et lui fit la remarque qu'il devrait se reposer. Sans relever la tête pour garder les yeux fixés sur le deuxième point qu'il était en train de terminer, Liam répondit, aussi détendu qu'il pouvait l'être:

-Je suis un peu fatigué, j'aurai dû finir mon service il y a longtemps, puis il a y eu une urgence, et ensuite vous êtes arrivé. Mais je vous assure que tout va bien, ne vous faites pas de souci.

Et, comme pour ponctuer cette affirmation, Liam termina le point, préparant son fil pour faire le suivant. Heureusement que cette intervention ne comportait que très peu de riques, s'il avait dû se lancer dans une opération grave au vu de sa fatigue et de son état de manque, il aurait pu faire un mort! Saleté d'As dont il ne parvenait pas à se débarasser! Et le pire, c'est que n'importe qui qui s'y connaissait un minimum pouvait s'en rendre compte quand il était en manque! C'est pour cela qu'il faisait en sorte de toujours avoir quitté l'hôpital avant que le manque ne revienne, mais il n'était pas à l'abri d'une situation comme celle-ci! Et que ferait-on si son secret était découvert? Absolument personne ne voudrait se faire soigner par un toxicomane! Il serait viré, sans doute également radié de l'ordre des médecins,la fin de tout. Si cela arrivait, il n'avait sans doute plus qu'à se tirer une balle dans la tête!

Des sueurs froides lui coulant dans le dos rien qu'à cette idée, Liam continua néanmoins ce qu'il faisait le plus calmement possible, tentant de cacher ses tremblements et ses pupilles marquées par la fatigue et le manque. Il faisait son possible pour respirer calmement, jusqu'à présent il n'avait pas encore commis la moindre erreur, il n'y avait pas de raison qu'il se trompe maintenant. Heureusement, il avait presque terminé, il ne lui manquait qu'un point à faire, à désinfecter et à faire un bandage, et la main de Mark n'aurait plus de problèmes.